Le bouche à oreille avait fait son office : le Lépreux Chauve était plein, Kalirr soulagé et le tenancier spectral gémissait de joie devant pareille rentrée financière. Les escorteurs avaient soif, consommaient bien et laissaient de jolis pourboires au fantôme servile. Il faut dire que, à l'occasion, il y avait de belles promotions sur les alcools phares de la maison.
Mais l’Osamodas au chapeau bleuté avait d’autres projets pour sa troupe ! Pas le temps de s'attarder sur les saucissons, ils devaient rejoindre l’archipel de Vulkania et mettre la main sur l’un de ses sous-traitants, un dénommé Kevenn. L’homme n’avait pas donné signe de vie depuis trop longtemps et devait impérativement lui livrer des marchandises.
Une promesse de récompense, un bonus en nature réservé aux plus efficaces, un tarif préférentiel pour les adeptes d’Osamodas... Que demander de plus ?
Le groupe motivé et très enthousiaste — à moins que ce ne soit les effets de la Guy Nasse ? — quitta le Lépreux Chauve, direction Vulkania !
C’est dans une taverne locale aux produits exotiques — mais pas aussi fameux que ceux du Lépreux Chauve (deux boissons pour le prix d’une contre remise de ce coupon) — que les gros bras entendirent parler du fameux Kevenn.
Un Pandawa étonnamment encore frais — l’abus de soleil est dangereux pour la santé de quiconque a rapidement soif — s’épancha sur sa relation avec le disparu une fois sa soif étanchée. Les p’tites mousses lui manquaient,
Prapoupas le rosé l’avait bien compris, et cet adepte d’Osamodas avait su abreuver consciencieusement le pauvre Dirk Kenek — car tel était le nom du trublion — pendant que
Maître Éli Tij, avocat de son état, encourageait cette débauche éthylique.
Dirk perdit en contenance au fur et à mesure qu’il éclusa les gobelets et… et… Hips ! Ouais, il co… il connaissait Kev — Hips ! — Kevenn… Même qu’il dev… qu’il devait charger une cargais-hips ! Une cargaison du côt… du côté de l’îlot sans nom.
Foie de Pandawa et lapeur d’amer, s’il mentait qu’on lui serve son dernier verre ! Ivre mort, il voulut mener ses bienfaiteurs à bon port, sinuant autant qu’il titubait, au grand désespoir du Sacrieur
Sherp.
L’îlot sans nom ? Cette absence d’appellation disait bien quelque chose à quelques escorteurs, mais… C’est qu’il y avait plusieurs bancs de sable non baptisés autour de l’île principale ! La confusion — d’aucuns parleraient d’optimisation exploratoire, d’autres de soucis d’orientation — sévit dans les rangs et, quand certains parvinrent à alpaguer un lamaneur compétent — payer, frauder ou tabasser, vous connaissez la chanson — l’une des leurs s’égara du côté de la Baie Tarad.
A peine remise d’un douloureux coup de soleil, la dénommée
Lilifolle se rendit compte qu'elle ne trouverait aucun batelier dans les environs. Cependant, elle fut intriguée par la présence d’une caisse de bois échouée sur le rivage. Même aidée par le serviable
Meow-vapeur, de passage dans le coin, elle ne parvint pas à faire bouger le lourd contenant. Elle rebroussa donc chemin et retrouva ses camarades.
Ceux-ci avaient pu retrouver Kevenn le Disparu.
Un disparu relativement serein, au vu de la situation, et occupé à ramasser ce qui restait des marchandises contenues dans l’une de ses barques.
Il expliqua à ses visiteurs et son commanditaire que lui et ses hommes avaient été attaqués, alors que les deux barcasses chargées de denrées qu’il destinait à son voilier, s’apprêtaient à quitter le rivage. Les assaillants n’avaient incompréhensiblement rien dérobé, se contentant de causer un maximum de dégâts avec l’aide de la faune locale. Cet événement n’ayant pas été prévu dans le contrat qui le liait à Kalirr, Kevenn ne pouvait donc lui présenter que de plates et bien piètres excuses, sans possibilité de remboursement.
Avec un peu de chance, les caisses qu’il lui destinait s'étaient échouées sur une plage de l’île principale après avoir été emportées par les courants, mais rien n’était moins sûr...
Des caisses ? Sur une plage ? Lilifolle en avait vu au moins une ! Elle guida la troupe jusqu’à la Baie Tarad et tout le monde se retroussa les manches pour désensabler le conteneur détrempé.
Tout le monde ? Pas exactement…
Au lieu de mouiller le maillot, certains s’intéressèrent davantage à ce qui était inscrit sur la caisse : « Coquetels », à l’image de
Lynus-Hope et de
Phenor.
Derzo,
Soute-a-bagage et bien d’autres, quant à eux, se brisèrent le dos en s’échinant à pousser, tirer, décoincer et soulever l’encombrant colis jusqu’à la planque, où Kevenn avait indiqué à Kalirr qu’il pourrait plus tard l'y retrouver. C’était un lieu sûr où il avait coutume de se réfugier, et encore plus maintenant qu’il avait eu maille à partir avec les mystérieux agresseurs.
Quelle surprise pour la bande lorsqu'elle pénétra dans la cachette ! Quelle plus grande surprise encore lorsque ses membres découvrirent qu’un Kanniboul y avait élu domicile depuis le dernier passage de Kevenn !
Reconverti en tant que guide gastronomique, l'énergumène ambitionnait de créer différents circuits comportant des points de chute et Vulkania était l’un de ceux-là. C’est pour cette raison qu’il avait décidé de s’installer dans cet endroit, afin d’en faire un relais culinaire destiné à ses compatriotes voyageurs.
Pour ce faire, il avait commencé par y installer un totem rituel, garant de la salubrité des lieux et de son lien spirituel avec Moon. Ce totem, évidemment, ne pouvait acquérir une personnalité à la fois propre au lieu et à la culture Kanniboul qu’à travers la réalisation de la soupe rituelle qui lui conférerait tous ses pouvoirs magiques.
Une fois que le totem aurait « consommé » suffisamment de soupe, il se mettrait à croître jusqu’à obtenir une taille suffisamment imposante pour servir de relais à la foi Kanniboul.
C’est ce qu’expliqua le touriste du goût. Ses interlocuteurs, eux, ne comprirent que :
« Moi préparer soupe magique. »C’est aussi ça, les voyages : s’ouvrir à d’autres cultures, découvrir des traditions étrangères, des coutumes dépaysantes, des… Ahem. Le cortège préféra ouvrir la caisse.
A l’intérieur, aucun coquetel ! Seulement une krokille, encore intacte, qui l’eût cru ?
S’en suivit un débat, mené de main de maître par
Kio-maru, sur le degré d’incompétence de Kevenn et les compensations financières qu’il aurait à verser à Kalirr tandis que certains proposaient déjà d’ajouter quelques membres et parties charnues douziennes dans le potage qui mijotait tranquillement sur le feu du Kanniboul.
Faute de parvenir à un accord satisfaisant pour tout le monde — Dirk était passé à un doigt de perdre plus qu’un index dans l’affaire —
Calachnicof-Voltin la masquée aida le cuistot de l’île de Moon à jeter la précieuse krokille dans son chaudron ! Sa soupe serait plus goûtue en cuisant la krokille à la krok, pardon… à la coque !
La mixture, la chaleur, le hasard ou le destin produisit un son, un bruit, une ode à la vie :
La krokille était en train d’éclore ! Le totem luisait ! Un éclat vola, puis deux, puis trois jusqu’à ce que soit libérée une créature chétive, sombre et désorientée. Alors que la sculpture votive du Kanniboul poussait, Grazouillette venait de voir le jour et, surtout, la première créature vivante qui se dressait devant elle :
Prapoupas l’Osamodas.
Destinés, c’est à croire qu’ils étaient tous les deux destinés l’un à l’autre. Le rose s’enticha de la noirâtre, jeune papa épris d’une affection sincère, conforme aux préceptes de sa foi. La petite, elle, dévorait son père adoptif du regard, attentive au moindre de ses gestes, câline et… Affamée.
La krokille mourait de faim ! Qu’à cela ne tienne, un commando d’élite — la fine fleur des chasseurs honoraires vulkains — se rua hors de la cachette et sema la mort et la désolation sur son passage dans la jungle, terrible jungle, Grazouillette sur ses talons.
Tandis que la forêt de Ponefarr résonnait du massacre des innocentes krokilles qui y résidaient, l’atelier de cuisine du Kanniboul vécut l’intervention de maîtres queux comme il ne faudrait surtout plus jamais en refaire : Lilifolle et Soute.
La soupe prit une teinte indescriptible et son odeur aurait fait tomber les sourcils d’un Craqueleur, mais cet évènement passa inaperçu car il coïncida avec le retour de Grazouillette, son Prapoupapa et leurs accompagnateurs viandards — de véritables Chassouilleurs, ceux-là — chargés de chairs sanguinolantes.
La krokille mangea, et fut prise d’une sacrée poussée de croissance, arrivant désormais au-dessus de la ceinture de ses bienfaiteurs. Le totem Kanniboul s’éleva également. Ah, les bienfaits de la soupe...
C’est, à peu de choses près, ce moment que choisit un Tofu Albinos pour pénétrer dans la cachette. Il y fit le tour du propriétaire, pépia à qui mieux mieux et prit la poudre d’escampette, poursuivi par la colonne des anciens escorteurs devenus de surprotecteurs parents nourriciers.
Le volatile rejoignit sa maîtresse, en maraude non loin de la cachette, et lui fit — sembla-t-il — un compte-rendu détaillé de ses observations. L’adoratrice d’Osamodas verdit de rage.
Même à plusieurs kamètres de distance, son haleine fétide frappa les accompagnateurs de Grazouillette de plein fouet. Fouet qu’elle fit claquer à plusieurs reprises, menaçant celles et ceux qui avaient attenté à l’équilibre naturel des choses en corrompant l’instinct de la jeune krokille.
Lorsqu’elle reconnut Kevenn, la fanatique le désigna comme l’un des responsables de la barbarie douzienne à l’encontre du peuple du Maître des Bêtes, Osamodas le Cornu. Il avait mérité sa première rouste, du côté de la plage, et une autre l'attendait !
Il s’ensuivit un affrontement au cours duquel l’invocatrice au tofu blanc mordit la poussière, en dépit de ses discours poignants sur le respect de la cause animale et la souffrance infligée à la faune vulkaine par l’ignorance des touristes, ce, malgré le secours opportun de la naïve
Enyo-Gardelame.
Grazouillette, elle, se contenta de dévorer les restes des créatures tombées au combat, poursuivant sa croissance et dépassant en taille la plupart des personnes présentes.
Le phénomène intrigua la foule qui s’interrogea sur son avenir… Fallait-il la ramener sur le continent ? N’appartenait-elle pas à Kalirr, après tout ? Comment la nourrir, une fois parvenue en
Terra Amakna ?
Décision fut prise de la dissimuler sur Vulkania, le temps de réfléchir à toutes ces questions. L’heure venue, Kalirr préviendrait ses fidèles escorteurs et, ensemble, ils détermineraient quel serait le destin de la peti… de la massive Grazouillette.
Fallait-il y voir un présage de bon augure ou un signe du dieu Osamodas ? Une harde de minuscules krokilles insipides surprit la troupe et s’attacha à chacun de ses membres. La rumeur raconte que les créatures les conduisirent vers un pactole… Mais ceci est une autre histoire !
Cette animation vous a été proposée par les membres de la
Main du Valet Noir et n'aurait pas eu la même saveur sans les efforts conjugués de :
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Arlène-Kwinzel : Caisse-humide, Totem-Kanniboul
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Kalirr : Lui-même
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Kucci : Kevenn
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Simettra : Serviteur-fantomatique, Grumeau le Tofu albinos
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Varjo : Dirk-Kenek, Kanniboul-Cuistot
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Yenepha : Josepha-Natic
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[Meoboraj-Jaroboem] : Grazouillette, retours et soutien
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[Mu-Janji] : distribution des personnages suiveurs, téléportations, transformations, effets pyrotechniques, retours et soutien
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VOUS QUI ÉTIEZ LÀ, pardi !Un grand-grand merci à toutes et tous (nous espérons que vous vous reconnaîtrez sur les screens). N’hésitez pas à vous manifester et à rappeler à tout le monde quel rôle vous avez joué dans cette histoire !
Nous espérons que vous aurez autant apprécié cette animation que nous avons pris de plaisir à la réaliser. Vous l’aurez compris, l’aventure n’est pas finie :
Rendez-vous en août pour la seconde partie !Pour être avertis de nos prochaines animations, il vous est possible de suivre notre actualité.
Captures d’écran : Kalirr, Varjo
Compte-rendu : Arlene-Kwinzel, Simettra, Varjo, Yenepha